Depuis plusieurs années, le « milliard de cohésion » pendait telle une épée de Damoclès sur la politique suisse. Elle vient de tomber. Le 11 août dernier, le Conseil fédéral a donné son feu vert pour le versement de ce prétendu milliard de cohésion. A l’heure où la Confédération dit craindre des déficits records en raison de la crise sanitaire, le versement d’un milliard de francs suisses à des institutions qui n’on cessé de traiter notre pays avec mépris et arrogance est une honte.
Dans les années 2000, la Suisse a décidé sur une base totalement volontaire et dans un contexte de renforcement des relations bilatérales de verser un montant d’un milliard de francs au titre de la cohésion européenne. Il y a quinze ans, la Suisse venait de signer les accords bilatéraux II et entrait – contre l’avis de l’ASIN, rappelons-le – dans l’espace Schengen/Dublin. Il régnait une sorte d’euphorie proeuropéenne dans la Berne fédérale.
Dès 2008, la Commission européenne estimait que la Suisse devait se plier à de nouvelles règles en se soumettant à un accord institutionnel dont les litiges seraient soumis aux verdicts de la Cour de justice de l’Union européenne. Il s’agissait de se soumettre à une juridiction étrangère, ce qui revenait à adhérer à l’UE sans le dire ouvertement. Inacceptable !
Les agents suisses de l’Union européenne
Les agents suisses de l’Union européenne pensaient tenir le couteau par le manche. La décennie 2000-2010 avait vu la conclusion d’accords bilatéraux, le versement d’un milliard de francs à titre volontaire et les tentatives de limiter l’extension successive de la libre circulation aux nouveaux membres de l’UE avaient toutes échouées devant le peuple. Il ne restait plus qu’à composter le ticket en approuvant un accord institutionnel, présenté comme un accord d’accès au marché et non pas comme une soumission aux juges de l’UE.
Le coup de tonnerre n’en fut que plus fort quand, le 9 février 2014, le peuple et les cantons approuvaient l’initiative contre l’immigration de masse. Choqués, puis vexés par la décision démocratique suisse qui remettait en cause la libre circulation des personnes, les bureaucrates européens ont adopté des mesures chicanières contre la Suisse, notamment dans le domaine de la recherche. Les agents suisses de l’UE parvinrent à sauver les meubles en adoptant une loi d’application de l’initiative qui évitait précisément de mettre l’initiative en œuvre.
Les mesures chicanières et l’accord cadre
Début 2018, la majorité du Parlement ayant préféré se soumettre à l’autoritarisme de Bruxelles plutôt qu’à la volonté majoritaire du peuple et des cantons, l’épisode ouvert par l’acceptation de l’initiative contre l’immigration de masse était désormais clos à la satisfaction de l’UE. Aux yeux des bureaucrates européens, la voie était désormais libre pour enfin ratifier l’accord cadre institutionnel.
En Suisse, la classe politique commençait à comprendre que les choses n’iraient pas aussi aisément qu’espéré par la Commission européenne. Il fallait donc temporiser et patienter. Or, la patience n’est pas la principale vertu des bureaucrates européens. Ces derniers sont habitués à être obéis au doigt et à l’œil et ce n’est certainement pas ce petit pays qui fait tache au milieu de l’Europe en refusant d’adhérer à l’UE qui allait le faire mentir.
Face à la temporisation suisse, l’UE réactivait les menaces de nouvelles mesures chicanières. C’est dans ce contexte – aux antipodes des relations cordiales qui prévalaient 10 ans plus tôt – que le débat sur le versement d’un deuxième « milliard de cohésion » s’invite à table.
NON au chantage ! NON au milliard de la honte !
Bien décidée à mettre la Suisse au pas et devenue impatiente, Bruxelles supprimait l’équivalence boursière entre la Suisse et l’UE et conditionnait sa réactivation à la ratification de l’accord cadre. SI la mesure est un affront politique, elle demeure sans réelle conséquence concrète, sinon qu’elle reviendra punir l’arrogance des bureaucrates de l’UE tel un boomerang qui frappe le visage du lanceur.
Alors que la Suisse débat de l’opportunité de ratifier l’accord cadre que le Conseil fédéral a rendu public lors d’une consultation, Bruxelles jette de l’huile sur le feu et laisse planer le doute de nouvelles mesures chicanières.
C’est alors que le Parlement fédéral suspend le versement du « milliard de cohésion » à la levée des mesures chicanières. L’UE pensait que le renouvellement de cet engagement volontaire de la Suisse irait de soi, mais tel n’est plus le cas. Il faudra mettre un terme aux chicanes pour espérer voir la couleur des précieux francs suisses !